samedi 29 août 2009

Robert Bourgi, vétéran de la Françafrique

Raphaëlle Bacqué, Le Monde

Sa Maserati est garée à trois pas de ses bureaux, dans le 16e arrondissement de Paris. LorsqueRobert Bourgi se rend en Afrique, c'est presque toujours dans un avion privé affrété par une grande entreprise intéressée par son carnet d'adresses au Gabon, au Congo-Brazzaville, en Côte d'Ivoire ou par un chef d'Etat africain auquel il vend la promesse de contacts politiques de haut niveau en France. Cet entregent est manifestement la source de cette vie confortable, bien plus que son statut officiel d'avocat, lui qui avoue en rian t : "C'est ma femme, Catherine, qui traite les dossiers et plaide. Moi, j'apporte les affaires. D'ailleurs, je n'ai passé la robe que le jour de ma prestation de serment."

A table, il est volubile, amusant, grand amateur de chablis bien qu'il s'affirme "musulman chiite"et plus encore de femmes "sauf des Africaines avec lesquelles (il n'a) même jamais dansé". Du vivant d'Omar Bongo, il régnait sur l'Hôtel Meurice, le palace parisien où le président gabonais recevait lors de ses séjours en France. Les hommes d'affaires de toutes sortes faisaient antichambre. Pas lui. Bongo était tout à la fois son client, peut-être son ami, et en tout cas le parrain de la petite fille qu'il a eue, tardivement, d'une liaison adultérine assumée, y compris par son épouse- Bourgi étant lui-même le parrain de l'un des fils de Bongo.

Robert Bourgi a toujours appelé Omar Bongo, à l'africaine, "papa". Le secrétaire d'Etat français chargé de la coopération, Alain Joyandet, se souvient de l'avoir vu entrer sans frapper dans la suite du président pour s'introduire sans façon au milieu de leur conversation.

Autant dire que la mort du chef d'Etat gabonais et l'élection présidentielle du dimanche 30 août sont un enjeu majeur pour celui qui se targue d'être le fils spirituel de Jacques Foccart - grand ordonnateur du gaullisme en Afrique et des réseaux qui s'assurèrent après les indépendances de la soumission des anciennes colonies africaines aux intérêts de la France.

C'est Robert Bourgi qui a laissé filtrer, le 7 juin, d'un coup de fil au Point, la nouvelle de la mort d'Omar Bongo. "Ce soir-là, il était mort cliniquement. Je ne sais même pas s'il n'était pas parti avant", glisse-t-il tranquillement. Quelques heures plus tard, malgré les démentis farouches de l'Etat gabonais, l'AFP confirmait la mort du doyen de la Françafrique, citant "une source proche du gouvernement français", qui, à en croire Bourgi, n'était autre que... lui-même.

Existe-t-il plus haut attribut du pouvoir que de décider de l'heure de la mort d'autrui ? Ce fut, en tout cas, la façon la plus efficace de signifier au plus haut sommet des Etats français et gabonais un message clair : il faudrait compter avec lui pour gérer la succession.

Depuis l'élection de Nicolas Sarkozy, le franc-tireur Robert Bourgi est partie prenante de la politique africaine de l'Etat. Dans la galaxie foisonnante des intermédiaires et des communicants qui vendent leur influence aux dirigeants africains, il occupe une place à part. "Je suis un ami très écouté de Nicolas Sarkozy", insiste-t-il.

Cet été, il a mis toute son énergie au service de l'élection de son poulain, Ali Ben Bongo, fils et héritier du président défunt qu'il présente comme "le meilleur défenseur des intérêts français dans tous les domaines". Mais son candidat est aussi son client : "Si Ali Bongo n'est pas élu, Bourgi perd l'un de ses derniers gros marchés", résume un haut diplomate.

D'où vient que ce sexagénaire chaleureux, né à Dakar dans une famille de grands commerçants libanais et "initié à l'Afrique par M. Foccart", ait gardé tant d'influence à droite, notamment auprès d'un Nicolas Sarkozy qui, lors de sa campagne, promettait d'en finir avec ces réseaux parallèles à la diplomatie ?

D'un sens aigu de la psychologie du pouvoir. D'un charme à la fois viril et désuet. D'un goût affirmé de la discrétion. Et d'un très solide réseau. Car Robert Bourgi, fils d'un riche importateur de textile, a su faire fructifier ses connaissances. Son père a noué des relations d'affaires avec Jacques Foccart. Le conseiller de De Gaulle, puis de Georges Pompidou, dirige alors une société d'import-export de tissu, la Safiex, "en relation d'affaires avec papa, un richissime importateur de textile" à Dakar.

Mahmoud Bourgi, gaulliste de la première heure, est l'un des premiers inscrits au Rassemblement du peuple français (RPF). Son fils écrit donc à Foccart, lorsque, après des études de droit en France, il cherche une situation. Sa thèse de doctorat d'Etat a porté sur "Le général de Gaulle et l'Afrique noire". Il enseigne le droit comme coopérant à Cotonou, Nouackchott puis Abidjan. Il rêve de mieux.

A la faculté d'Abidjan, il a rencontré Laurent Gbagbo, alors professeur d'histoire, qui deviendra en 2000 président de la Côte d'Ivoire. Jacques Foccart n'a pas de successeur. Mais il introduit Bourgi auprès de Jacques Chirac. et surtout, en 1978, auprès de l'homme-clé de l'Afrique de l'époque, l'inventeur du concept de Françafrique, le président ivoirien Félix Houphouët-Boigny. Les relations avec le président du Congo, Denis Sassou Nguesso, puis avec Omar Bongo suivront.

Avec tous, Robert Bourgi copie ce mélange de déférence apparente et de familiarité propre à Foccart et y ajoute son humour et sa chaleur orientale. En France, il s'est immiscé avec le même entregent dans les milieux politiques, auprès de Jacques Chirac, de Charles Pasqua - avec lequel il se fâchera - et de Nicolas Sarkozy, rencontré en 1983 au siège du RPR, "un gamin brillantissime", dit-il.

En 1997, la mort de Jacques Foccart menace soudain de le fragiliser. Il va jouer son coup de maître. Le jour de l'enterrement, alors qu'il pleure comme un enfant la mort de ce "second père", Chirac le prend dans ses bras et le convie à passer le soir même à l'Elysée. Il y a là son secrétaire général Dominique de Villepin. Et Jacques Chirac adoube Robert Bourgi : "Vous allez travailler ensemble, Dominique et vous. Si je ne suis pas disponible, c'est lui qui vous recevra." Désormais, Bourgi initiera Villepin à l'Afrique.

Cela ne va pas sans résistance. Le Quai d'Orsay est révulsé par les méthodes de Bourgi. Le conseiller officiel pour l'Afrique de Jacques Chirac, Michel de Bonnecorse, affirme que le président lui a répondu, alors qu'il lui demandait que faire des demandes de rendez-vous de Bourgi : "Vous ne le prenez pas au téléphone, vous ne le recevez jamais à la présidence. S'il a des choses à dire, qu'il les dise au ministère des affaires étrangères."

Il n'empêche, Robert Bourgi rencontre Dominique de Villepin une fois par mois. Il lâchera cependant le protégé de Jacques Chiracle jour où il comprendra que celui-ci n'a aucune chance de l'emporter à la présidentielle. "Bourgi a ramené à Sarkozy la ration d'aide financière prévue pour Villepin de la part de Bongo et de Sassou", assure aujourd'hui un chiraquien.

Son rôle auprès de Nicolas Sarkozy ? "Du trafic d'influence", pestent les diplomates qui assurent qu'il crée de faux conflits entre la France et les chefs d'Etat africains afin de monnayer sa capacité à les réconcilier. "Je travaille à la fois pour les présidents africains et pour le président français, explique-t-il tranquillement.Je ne suis pas conseiller, plutôt missi dominici. Mais je ne me déplace jamais sans informer Sarko et Guéant."

Le secrétaire d'Etat à la coopération, Alain Joyandet, ne l'ignore pas. "Il ne fait pas la politique de la France en Afrique, affirme-t-il,mais il exprime parfois des choses que nous ne pourrions pas dire." Claude Guéant explique qu'il "aime bien bavarder avec lui des réalités africaines""Il perçoit l'importance des phénomènes tribaux, des croyances, argumente le secrétaire général de l'Elysée. Mais nous ne lui confions aucune mission. Et s'il prétend avoir vendu aux pouvoirs publics sa préférence personnelle, il va au-delà de son rôle." Bruno Joubert, le conseiller Afrique du chef de l'Etat, voudrait pour sa part ne lui voir jouer qu'un rôle d'informateur sur la vie privée des chefs d'Etat africains, comme lors de l'hospitalisation d'Omar Bongo, que la France n'a pas apprise par les canaux diplomatiques officiels.

Robert Bourgi tourne cela autrement : "Au Gabon, la France n'a pas de candidat, mais le candidat de Robert Bourgi, c'est Ali Bongo, explique-t-il en souriant. Or je suis un ami très écouté de Nicolas Sarkozy. De façon subliminale, l'électeur le comprendra."

Il a en tout cas su se faire adouber symboliquement par le nouveau président français en figurant dans le cercle réservé à la famille, lors de la cérémonie d'investiture, le 16 mai 2007. Puis se faire remettre la Légion d'honneur par Nicolas Sarkozy, le 27 septembre 2007. Obtenir, au nom d'Omar Bongo, le renvoi du ministre de la coopération Jean-Marie Bockel, coupable d'avoir déclaré mettre fin à la Françafrique. "Il a gravi un à un une échelle qui a accrédité l'idée de sa surpuissance et augmenté le nombre de dirigeants prêts à payer ses services", reconnaît l'écrivain Jean-Christophe Rufin, ambassadeur de France au Sénégal. Il appartient aujourd'hui au premier cercle des donateurs de l'UMP, ceux qui peuvent donner au maximum 7 500 euros et apporter les contributions de leurs amis.

Sur le plan politique, la puissance de Robert Bourgi est cependant plus fluctuante qu'il le laisse croire. Il ne monnaie plus son entregent que dans cinq ou six pays sur les cinquante-trois que compte l'Afrique. Mais nombre de diplomates craignent que son influence auprès de Nicolas Sarkozy reflète l'idée que le président se fait de l'Afrique, celle d'"un continent qu'on ne tient que par les barbouzes".

vendredi 28 août 2009

Mauritanie: Dimanche rencontre de toute l'opposition

PANA - Nouakchott - Le chef de file de l'opposition mauritanienne, Ahmed Ould Daddah, président du Rassemblement des forces démocratiques (RFD), a convié, pour dimanche, six partis politiques de l'opposition à une réunion, a appris la PANA vendredi de sources autorisées.

Cette rencontre, la première du genre depuis l'élection présidentielle du 18 juillet 2009 remportée dès le premier tour par Mohamed Ould Abdel Aziz sous la contestation de ses principaux adversaires, va regrouper autour du RFD l'Union des forces de progrès (UFP), le pacte national pour la démocratie (PND-ADHIL), l'Alliance populaire progressiste (APP), le Rassemblement national pour la réforme et le développement (RNRD-Tawassoul) et HATEM.

Toutes les formations politiques devant prendre part à cette rencontre destinée à débattre de l'attitude des différents segments de l'opposition vis- à-vis du nouveau pouvoir sont représentées à l'Assemblée nationale.

Anciennement membre de l'opposition sans représentation au parlement, l'Alliance pour la justice et la démocratique/Mouvement pour la réconciliation (AJD/MR) n'a pas été conviée à la rencontre.

samedi 22 août 2009

Mauritanie/terrorisme : le président appelle à l'union contre l'extrémisme


NOUAKCHOTT — Le président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz, élu en juillet, a appelé vendredi soir les Mauritaniens à s'unir contre l'extrémisme dans un discours prononcé à l'occasion du début du mois du ramadan, quelques semaines après un attentat suicide revendiqué par Al-Qaïda.

M. Ould Abdel Aziz a souhaité que chacun contribue à "l?éradication des mauvaises pratiques contraires aux préceptes de la sainte religion qui bannit la violence, l?extrémisme et tout ce qui porte atteinte à l?homme sans raison".

"La religion musulmane prêche la tolérance, la fraternité, la commisération. Seule la faiblesse de la foi induit parfois beaucoup de gens en erreurs fatales", a ajouté le dirigeant de la République islamique de Mauritanie.

Citant le Coran, M. Ould Abdel Aziz a ajouté: "le sort de celui qui commet un tel crime" (attenter à la vie d'un homme) n'est autre que "l'enfer éternel, la malédiction et la colère du seigneur".

Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) avait revendiqué l'attentat suicide perpétré le 8 août près de l'ambassade de France à Nouakchott. Un jeune Mauritanien s'était tué en faisant exploser la charge qu'il transportait, blessant légèrement deux gendarmes français et une Mauritanienne.

Selon le centre américain de surveillance de sites islamistes (SITE), l'organisation terroriste avait présenté l'attaque comme une riposte aux agressions des "Croisés" et des dirigeants mauritaniens contre l'islam et les musulmans.

Cette action avait eu lieu trois jours après l'investiture de l'ex-général putschiste Mohamed Ould Abdel Aziz dans ses fonctions de président élu de la Mauritanie.

vendredi 21 août 2009

Mauritanie: RSF dénonce la condamnation d'un journaliste à 6 mois de prison

DAKAR — Reporters sans frontières (RSF) a "fermement condamné" la décision d'un tribunal de Nouakchott "d'infliger six mois de prison" au journaliste mauritanien Hanevy Ould Dehah, directeur de publication du site Taqadoumy pour "atteinte aux bonnes moeurs".

Ecroué depuis deux mois, Hanevy Ould Dehah a en outre été condamné mercredi au paiement de 51.000 ouguiyas (142 euros) d'amende et de frais de dossier.

Selon le jugement du tribunal de la wilaya de Nouakchott, dont Reporters sans frontières détient une copie, le journaliste a été relaxé des accusations de "diffamation", "d'incitation à la rébellion" et "d'incitation à la commission des crimes et délits" pour "cause d'absence de textes exécutoires et applicables aux délits commis par voie de presse électronique."

RSF rappelle que le journaliste avait été arrêté le 18 juin suite à une plainte déposée le 22 mai par le candidat à l'élection présidentielle Ibrahima Moctar Sarr, du parti d'opposition AJD/MR (l'Alliance pour la justice et la démocratie/Mouvement pour la rénovation). Dans un communiqué, cette formation avait reproché au journaliste d'avoir "sali", dans un article, "l'image d'homme politique intègre et honnête" de M. Sarr.

"Cette condamnation est disproportionnée et vise simplement à rétablir la +bonne+ réputation de l'homme politique Ibrahima Moctar Sarr mis en cause par le webjournaliste. Nous espérons que la justice infirmera son jugement en appel et que le journaliste retrouvera bientôt la liberté", écrit l'organisation basée à Paris.

L'avocat du journaliste, Me Brahim Ould Ebetty, avait assuré jeudi à l'AFP que la condamnation pour atteinte aux bonnes moeurs concernait "une page débat réservée par Taqadoumy aux moeurs et notamment à l'éducation sexuelle".

Très controversé en Mauritanie, le site Taqadoumy critique de façon virulente, depuis le coup d'Etat du 6 août 2008, les militaires putschistes ainsi que d'autres personnalités, et se positionne clairement dans l'opposition au nouveau régime du président Mohamed Ould Abdel Aziz.

mercredi 19 août 2009

Al-Qaïda, une "métastase" sur le corps mauritanien selon le ministre des Affaires étrangères


PARIS — Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), qui a revendiqué l'attentat suicide du 8 août contre l'ambassade de France à Nouakchott, est une "métastase" étrangère à la Mauritanie, a déclaré mercredi Naha Mint Hamdi Ould Mouknass, sa ministre des Affaires étrangères.

Le terrorisme d'Al-Qaïda correspond à un "comportement complètement étranger à la population mauritanienne", c'est "une métastase". "Il faut savoir arrêter cette métastase terroriste au niveau du corps mauritanien", a-t-elle dit dans une interview à la chaîne d'information France 24.

"Il faut poser une stratégie douce qui se matérialise par la lutte contre la pauvreté et l'ignorance, et il faut aussi lutter de manière efficace et un peu plus violente. C'est une méthode dure, difficile mais certainement les jours à venir vont nous prouver qu'elle est efficace", a-t-elle ajouté.

La revendication de l'Aqmi est accompagnée, selon le centre américain de surveillance de sites islamistes (SITE), par une photographie du kamikaze, identifié comme Abu Obeida Musa al-Basri, et qui habitait le quartier Basra dans la capitale mauritanienne. La photographie montre un homme portant l'habit traditionnel mauritanien.

L'auteur de l'attaque a péri dans l'explosion de la charge qu'il transportait et qui n'a que légèrement blessé deux gendarmes français et une Mauritanienne.

L'Aqim affirme, selon le SITE, que l'attaque était une riposte aux agressions des "Croisés", notamment la France, et des dirigeants mauritaniens contre l'islam et les musulmans.

Un journaliste condamné à 6 mois de prison pour atteinte aux bonnes moeurs

Un journaliste mauritanien, directeur du site d'informations en ligne Taqadoumy, a été condamné mercredi à Nouakchott à six mois d'emprisonnement pour "publications contraires à l'Islam et aux bonnes moeurs", a-t-on appris auprès de son avocat.

"Henevi Ould Dehah a été condamné par le juge de la cour (correctionnelle du tribunal de Nouakchott) à six mois de prison ferme assortie d'une amende de 30.000 ouguiyas (81 euros)", a déclaré son défenseur, Me Brahim Ould Ebetty.

Selon son défenseur, le journaliste était jugé pour "diffamation et incitation à la rébellion" et pour "publications contraires à l'Islam et aux bonnes moeurs". "Le juge a condamné Henevi pour ce dernier chef d'inculpation, mais il l'a relaxé pour le premier, estimant qu'il n'existait pas de textes en la matière concernant la presse électronique", a affirmé l'avocat.

Le défenseur a protesté contre cette "contradiction flagrante" selon lui: "Comment peut-on à la fois arguer l'absence de texte pour relaxer et en même temps condamner pour les mêmes motifs?" a-t-il demandé.

L'avocat a assuré qu'il avait fait appel du jugement, en axant son argumentation sur cet aspect précis.

M. Ould Dehah avait été arrêté et écroué fin juin, notamment suite à une plainte pour diffamation déposée par le candidat à l'élection présidentielle Ibrahima Moctar Sarr, du parti d'opposition AJD/MR (l'Alliance pour la justice et la démocratie/Mouvement pour la rénovation). Cette formation avait reproché au journaliste d'avoir "sali", dans un article, "l'image d'homme politique intègre et honnête" de M. Sarr.

Plusieurs syndicats de journalistes et personnalités avaient demandé la remise en liberté du prévenu et la suppression des peines d'emprisonnement pour les délits de presse.

Très controversé en Mauritanie, le site Taqadoumy critique de façon virulente, depuis le coup d'Etat du 6 août 2008, les militaires putschistes ainsi que d'autres personnalités, et se positionne clairement dans l'opposition au nouveau régime du président Mohamed Ould Abdel Aziz.

En mars, la justice mauritanienne avait ordonné la fermeture du site pour publication d'informations "mensongères et calomnieuses" avant de renoncer à cette décision.

, le mercredi 19 août, 2009

mardi 18 août 2009

Ce que Aziz doit aux Négro-Mauritaniens

Marianne Meunier, Jeune Afrique, le mardi 18 août 2009
Ce que Aziz doit aux Négro-MauritaniensCe que Aziz doit aux Négro-Mauritaniens© AFP

Élu en partie grâce aux voix d’une communauté dont il a su gagner la confiance, le nouveau président sera-t-il à la hauteur des attentes qu’il a nourries ?

L’investiture de Mohamed Ould Abdelaziz, le 5 août, a sonné l’heure du départ pour Ba M’Baré. Un départ sans tambour ni trompette, à l’image de cet homme de 62 ans qui fut, pendant près de cent jours, un président p ar intérim très discret. Et pour cause : chef de l’État autoproclamé depuis son putsch du 6 août 2008, « Aziz » a démissionné le 15 avrilpour être candidat à la présidentielle du 18 juillet ; en tant que président du Sénat, Ba M’Baré l’a remplacé. Mais sur le papier seulement, le général n’ayant pas lâché les commandes.

Si furtif soit-il, l’épisode Ba M’Baré a néanmoins valeur de symbole : originaire de Maghama, dans le Gorgol, région frontalière du Sénégal, il est le premier Négro-Mauritanien à avoir été chef de l’État. Depuis l’indépendance, la fonction est restée le monopole des Arabo-Berbères, qui détiennent la quasi-totalité du pouvoir économique et politique. Ba M’Baré tirant sa révérence, les Négro-Mauritaniens vont-ils de nouveau être mis à l’écart ? Abdelaziz leur doit en partie son élection au premier tour, avec 52,47 % des voix (résultat qui a fait l’objet d’une demande d’enquête par deux candidats défaits). Dans la vallée du fleuve Sénégal, il a même raflé certains bastions à l’un de leurs principaux leaders, Ibrahima Sarr, militant du partage du pouvoir entre communautés et cofondateur, dans les années 1980, des Forces de libération des Africains de Mauritanie (Flam).

Blessures vives

Exemple dans la ville de Kaédi, baignée par les eaux du Sénégal : à la présidentielle de mars 2007, Ibrahima Sarr y arrive en tête, avec 36,26 % des voix ; le 18 juillet, il doit se contenter d’un petit 12,93 %, quand le futur vainqueur l’emporte haut la main avec 43,93 % des suffrages. Même scénario à Boghé, une cinquantaine de kilomètres plus loin : 37,18 % pour Aziz, contre 18,86 % pour Sarr, qui, deux ans plus tôt, dépassait la barre des 35 %. Au final, Sarr, arrivé quatrième à l’issue du premier tour de mars 2007, avec 7,94 % des voix, a vu son score national chuter à 4,59 %. « Vu ce qu’Aziz nous a pris, ce résultat, on l’a arraché de haute lutte », commente-t-il. Assis sur un canapé en cuir blanc assorti à son boubou, il réfléchit à son échec dans un salon de son siège de campagne : « Ce qui a donné à Aziz son aura dans la vallée, c’est le rapatriement des réfugiés et ce qu’il a commencé à faire avec les victimes des exactions », conclut-il.

Deux références aux pages sombres de l’histoire nationale : au tournant des années 1980, sous le régime de Maaouiya Ould Taya (au pouvoir de 1984 à 2005), le racisme se généralise jusqu’au sein de l’État. Des dizaines de milliers de Négro-Mauritaniens sont contraints de fuir au Sénégal et au Mali pendant que des centaines d’autres, surtout dans l’armée et l’administration, subissent des exactions cruelles – et souvent mortelles. Pendant près de quinze ans, le pouvoir a ignoré, voire caché, ces blessures encore vives. L’histoire officielle n’en faisait que pudiquement mention, utilisant l’euphémisme de « passif humanitaire ». Un tabou qu’Aziz s’est employé à briser. Avant lui, Sidi Ould Cheikh Abdallahi (renversé par le putsch du 6 août 2008) avait commencé à faire de même, tenant sa promesse de campagne : le rapatriement en Mauritanie des « déguerpis », qui, souvent privés de papiers d’identité, spoliés de leurs terres et de leurs biens, s’étaient exilés au Sénégal, avec le statut de « réfugié international ». Aujourd’hui, 13 000 réfugiés sont rentrés au pays.

Discours « historique »

Autre versant du passif humanitaire : les exactions. Le 25 mars, alors qu’il était encore chef de la junte, Aziz s’est rendu à Kaédi pour un discours que certains Négro-Mauritaniens ont qualifié d’« historique ». Le visage grave, il a évoqué « l’affliction causée à des dizaines de familles par l’ignorance et la barbarie de l’homme » et, dans la foulée, a assisté à une grande prière à la mémoire des victimes des années Ould Taya. Pour finalement accéder à une revendication que les familles des victimes des « années de braise » s’échinaient à défendre depuis des années : l’indemnisation des veuves et des orphelins.

Officielle, publique, sans ambiguïté : une telle commémoration est inédite en Mauritanie. Jamais un homme politique n’avait pris ainsi le risque de s’aliéner une partie de l’élite arabo-berbère. Le geste est d’autant plus surprenant que son auteur est un ancien afffidé de Maaouiya Ould Taya, celui qui, pendant près de vingt ans, à la tête du Bataillon de la sécurité présidentielle, lui a accordé une protection de tous les instants.

Calcul politique ou non – Aziz était à l’époque en campagne pour la présidentielle –, l’initiative a payé. Contrairement à d’autres militaires en service durant les « années de braise » – notamment le colonel Ely Ould Mohamed Vall, directeur de la Sûreté à l’époque et candidat le 18 juillet –, il ne suscite pas la rancœur chez les Négro-Mauritaniens. « Chacun sait qu’il n’est pas impliqué dans le passif humanitaire, reconnaît Kane Hamidou Baba, vice-président du Rassemblement des forces démocratiques (RFD), premier parti du pays, et originaire de la vallée. On ne lui connaît pas de positions racistes. » Plus généralement, l’homme a réussi le tour de force de passer pour le candidat anti-Ould Taya, figure honnie des Négro-Mauritaniens, et de présenter ses principaux adversaires comme des continuateurs de ce système, en faisant notamment remarquer que parmi leurs soutiens se trouvaient des auteurs du « pillage à ciel ouvert » du pays. Désormais investi, Aziz aura-t-il les coudées franches pour être ce président du changement espéré par les Négro-Mauritaniens ? Certains parmi eux exigent que les responsables des « années de braise » soient jugés. « Aziz marche sur des œufs », prévient l’un d’entre eux.

Al-Qaïda au Maghreb islamique revendique l’attentat anti-français

RFI - le mardi 18 août 2009

Le réseau al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) a revendiqué l'attentat suicide contre deux gendarmes français en Mauritanie, le 8 août dernier. L'information a été rapportée, ce mardi, par le Centre américain de surveillance des sites islamistes (SITE). C'est aussi al-Qaïda qui avait revendiqué l'assassinat, fin juin, d'un ressortissant américain en plein cœur de la capitale mauritanienne, Nouakchott. L'auteur de l'attaque, un Mauritanien selon le gouvernement, a péri dans l'explosion qui a blessé deux gendarmes français.

Un barrage de police dans le périmètre de l'ambassade de France à Nouakchott, le 8 août 2009, après l'attentat-suicide.(Photo : AFP)

Un barrage de police dans le périmètre de l'ambassade de France à Nouakchott, le 8 août 2009, après l'attentat-suicide.
(Photo : AFP)



L'attaque kamikaze contre l’ambassade de France à Nouakchott est une « riposte aux agressions des croisés, contre l'islam et les musulmans », c'est ce qu'on peut lire dans la revendication, selon le Centre américain de surveillance des sites islamistes. Il est précisé que « les croisés » sont la France et les dirigeants mauritaniens.

La revendication est accompagnée d'une photographie du kamikaze, Abu Obeida al-Basri, en habit traditionnel, et une arme à la main, la photographie a été prise en plein désert. Le texte affirme qu'il avait rejoint al-Qaïda au Maghreb islamique, il y a un an, et qu'il avait exprimé le désir de devenir « un martyr ». Selon AQMI, le kamikaze n'a pas réussi à entrer dans l'enceinte de l'ambassade en raison de la présence d'une barrière.

L'ambassade de France à Nouakchott est effectivement en plein travaux depuis plusieurs semaines, pour sécuriser sa porte d'entrée. Et c'est plus loin, le long d'un autre mur du périmètre français, que le Mauritanien a déclenché sa ceinture d'explosif.

Selon la presse mauritanienne, le kamikaze est issu d'une famille modeste de quatre enfants. Né en 1970, selon l’hebdomadaire mauritanien La Tribune, daté du 17 août, Abu Obeida al-Basri a raté trois fois le baccalauréat et le concours de la gendarmerie, avant de fréquenter avec assiduité les mosquées de la capitale et de disparaître un beau jour, sans rien dire. Jusqu'au début de ce mois d'août.

Après l'attentat du 8 août, le ministre mauritanien de l'Intérieur de l'époque, Mohamed Ould R'Zeizim, avait indiqué que le kamikaze était un Mauritanien « recruté par les salafistes » et entraîné « dans des camps » situés dans le Sahara.

lundi 17 août 2009

Les volontaires du Peace Corps quittent Nouakchott

RFI - le lund 17 août 2009

Après plus de quarante ans d’activité, l'organisation américaine des Peace Corps a, pour des raisons sécuritaires, suspendu son programme de volontariat en Mauritanie qui subit depuis 2007 une série d’actions terroristes. Cette décision intervient dans un contexte sécuritaire tendu depuis plusieurs semaines, mais en l'absence de tout « Travel Warning », c'est-à-dire un avertissement au voyageur de la part du département d'Etat américain.

Le Département d'Etat américain, ne déconseille pas la Mauritanie aux voyageurs, si ce n'est dans les régions désertiques du nord, et de l'extrême-est, où les activités d'al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) se sont intensifiées ces derniers temps. Les 350 ressortissants américains qui vivent dans le pays n'ont pas reçu non plus d'interdiction de se déplacer, seulement des conseils de vigilance.

Mais pour l'organisation des Peace Corps, l'évaluation du risque est différente, depuis l'assassinat d'un citoyen américain en juin dernier, et neuf jours après le premier attentat suicide qui a fait trois blessés.

Le maison-mère estime qu'il est potentiellement dangereux pour ses jeunes de voyager en toute sécurité dans le pays. Les 56 volontaires américains basés en Mauritanie se trouvent actuellement au Sénégal et ne réintègreront pas leur village d'accueil jusqu'à nouvel ordre.

Le Peace Corps n’est pas le seul à prendre des précautions. Il y a quelques semaines, la France avait demandé à une de ses organisations humanitaires installée à l'est du pays de prendre quelques vacances anticipées, du moins jusqu'à la rentrée qui devrait se faire, pour tous ceux qui restent, sous le signe de la sécurité.

Le siège de l'organisation américaine en Mauritanie n'est pas fermé pour l'instant. Les projets en cours seront suivis par le personnel local qui y travaille.

Le Peace Corps, basé à Washington, est présent dans 74 pays. En Mauritanie, les volontaires étaient déployés en particulier dans les régions rurales de ce pays pauvre et aux trois-quarts désertique. Ils intervenaient notamment, depuis 1967, dans les secteurs de l’agriculture, de la santé et de l’éducation.

 Sécurité accrue pour les ressortissants étrangers

Directement visé par l’attentat perpétré le 8 août, l’ambassade de France à Nouakchott réfléchi plus que jamais à protéger le Centre culturel français, aujourd'hui séparé de la rue par une grille et des arbres, ainsi que le lycée français qui doit rouvrir ses portes début septembre.

Des experts ont séjourné à Nouakchott au cours des derniers jours, afin de voir en particulier comment améliorer la circulation aux environs de l’établissement scolaire. Des jardinières en béton, qui serviront de bouclier, devraient faire leur apparition.

Suite à l’assassinat de 4 Français en décembre 2007 et aux affrontements entre islamistes et forces de sécurité en 2008 dans la capitale mauritanienne, certaines délégations étrangères ont déjà entamé des travaux. C’est le cas de l’Agence française de développement (AFD).

L’ambassade d’Allemagne a déjà pris, depuis l’année dernière, toutes les précautions nécessaires. Les Nations unies ont décidé de renforcer le périmètre situé aux abords d’une route très passante.

Cette semaine, les employés ont eu pour consigne de respecter les horaires légaux. Sauf urgence, pas question de faire des heures supplémentaires et de rentrer de nuit. Pour tous les ressortissants étrangers, les consignes sont les mêmes : Varier les itinéraires et éviter de circuler à pied. 

vendredi 14 août 2009

Un nouveau gouvernement à Nouakchott


Naha Mint Mouknass, ministre des Affaires étrangères du nouveau gouvernement. Une femme à la tête de la diplomatie, c'est une première dans le monde arabe.( Photo : Assemblée nationale.mr)

Naha Mint Mouknass, ministre des Affaires étrangères du nouveau gouvernement. Une femme à la tête de la diplomatie, c'est une première dans le monde arabe.
( Photo : Assemblée nationale.mr)

RFI - Le nouveau gouvernement mauritanien a été formé dans la nuit de mardi à mercredi. Les Mauritaniens ont donc découvert sa composition mercredi. Cette nouvelle équipe n'incarne pas l'ouverture. Le général Mohamed Ould Abdelaziz a en effet choisi de récompenser avant tout ceux qui l'avaient soutenu pour la présidentielle du 18 juillet. Mais l'opposition, toujours dans l'attente d'un dialogue politique, n'a pas émis de critiques particulières sur ces nominations.

Ce gouvernement est « atypique, à l'image du général Ould Abdelaziz », ces mots sont ceux d'un journaliste mauritanien, qui peine à définir la nouvelle équipe.

Dans les rangs de l'opposition, on se dit ni surpris ni déçu. Le président du parti de Sidi Ould Cheikh Abdallahi, renversé il y a un an, constate bien sûr qu'il ne s'agit pas d'un gouvernement d'ouverture, mais se refuse pour l'heure à tout commentaire sur le nom des ministres fraîchement nommés.

Il apparaît déjà clairement que le gouvernement ne reflète aucun dosage tribal, ni régional, ni communautaire. Le nouveau président a manifestement fait le choix de remercier ceux qui étaient à ses côtés...

Une femme à la tête de la diplomatie

La nomination qui fait le plus parler, c'est celle d'une femme à la tête de la diplomatie, une première dans le monde arabe. Naha Mint Mouknass est la présidente de l'UDP, l'Union pour la démocratie et le Progrès, un parti de la majorité. Elle est aussi la fille de l'ex-ministre des Affaires étrangères de Moktar Ould Daddah.

Son père, Hamdi Ould Mouknass était un ami personnel du président algérien Abdelaziz Bouteflika, du roi du Maroc Hassan II, du libyen Mouammar Kadhafi, ou encore du président du Cameroun, Paul Biya. Ce réseau, que la nouvelle ministre a reçu en héritage, devrait l'aider à redorer l'image de la Mauritanie, image sérieusement entamée après le dernier coup d'Etat il y a un an.

mercredi 12 août 2009

Un nouveau gouvernement formé, Laghdaf demeure Premier ministre

Le Premier ministre mauritanien Moulaye Ould Mohamed Laghdaf, le 30 novembre 2008 à Doha

NOUAKCHOTT — Le président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz, investi le 5 août, a reconduit mardi au poste de Premier ministre le diplomate Moulaye Ould Mohamed Laghdaf qui a aussitôt formé un nouveau gouvernement, a-t-on appris de source officielle.

Il y un an, quand le général Aziz avait pris le pouvoir par un coup d'Etat militaire en renversant le président élu Sidi Ould Cheikh Abdallahi, il avait choisi M. Ould Mohamed Laghdaf, un proche alors ambassadeur de Mauritanie à Bruxelles, pour diriger le "gouvernement de transition".

En juin, M. Ould Mohamed Laghdaf avait été reconduit à ce poste, pour diriger le gouvernement "d'union nationale" formé en application de l'accord de sortie de crise signé par les camps pro et anti-putsch.

La semaine dernière, M. Ould Mohamed Laghdaf avait présenté sa démission peu après l'investiture du président Ould Abdel Aziz dans ses fonctions de président élu.

Selon un décret présidentiel publié dans la nuit par les médias d?Etat, le gouvernement est composé de 27 portefeuilles, essentiellement attribués à des membres de la majorité ayant soutenu la candidature de M. Ould Abdel Aziz à la présidentielle.

Une femme, Naha Mint Hamdi Ould Mouknass, est nommée pour la première fois à la tête de la diplomatie mauritanienne en tant que ministre des Affaires étrangères et de la Coopération. Elle est la présidente d'un parti de la mouvance pro-Aziz, l?Union pour la démocratie et le progrès (UDP, qui compte deux députés).

mardi 11 août 2009

Nouakchott craint une radicalisation des djihadistes mauritaniens


AFP - LUNDI 10 AOÛT 2009 - En déclenchant sa ceinture explosive à proximité de l'ambassade de France à Nouakchott, un jeune kamikaze mauritanien a marqué samedi une nouvelle étape dans la radicalisation des milieux jihadistes de ce pays, soulignent des experts. 

Car si des réseaux extrémistes sunnites, liés aux Algériens d'Al-Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI), sont présents et actifs en Mauritanie depuis des années, et ont déjà tué des touristes français et un ressortissant américain, c'est la première fois qu'ils ont recours à l'attentat suicide.

"C'est une gradation dans la violence. Un changement dans la façon dont les choses se passent dans ce pays", estime Alain Chouet, ancien chef du service de renseignement de sécurité de la DGSE. 

"C'est une chose de convaincre quelqu'un de tirer sur des étrangers (...) C'en est une autre de convaincre un gars d'aller se faire sauter. Cela résulte d'une prise en main sur une longue période, et d'un lavage de cerveau", dit-il. 

"Le fait que la culture de l'action suicide se répande ainsi est un signe que l'ensemble de la mouvance islamiste sunnite intégriste fait école, même dans des endroits où ce n'est pas dans la culture locale", ajoute-t-il. 

Il rappelle qu'en Irak, en Somalie ou en Afghanistan, l'attentat suicide contre les forces occidentales ne faisait pas au départ partie de l'arsenal des combattants radicaux mais qu'ils y ont eu recours ensuite, en se radicalisant. 

"A la base, l'attentat suicide n'est pas dans la culture de l'islam sunnite", précise Alain Chouet. "Mais il en fait désormais partie, parce que cela fait vingt ans qu'on lave les cerveaux. On a maintenant des générations qui ont été élevées dans ce truc-là". 

Pour le journaliste mauritanien Isselmou Ould Moustapha, spécialiste du terrorisme à l'hebdomadaire Tahalil Hebdo, des volontaires kamikazes sont présents et prêts à l'action depuis des mois en Mauritanie. 

"Une attaque suicide avait été programmée en avril 2008 contre l'ambassade d'Israël à Nouakchott, mais les auteurs n'étaient pas passés à l'acte car l'attaque aurait fait trop de morts mauritaniens", assure-t-il. "Les salafistes avaient refusé les ordres de l'AQMI car ils n'étaient pas prêts à tuer des musulmans. Mais ce n'était que partie remise". 

Selon lui, des Mauritaniens affiliés à AQMI sont rentrés en juin dans leur pays, en provenance de la zone saharo-sahélienne où ils étaient soumis à une forte pression des armées malienne, algérienne et mauritanienne, aidées de milices locales.

"Soit le kamikaze s'est introduit dans le pays avec sa ceinture explosive, et c'est un problème de sécurité car il a pu passer tous les barrages", ajoute Isselmou Ould Moustapha.

"Soit il reste à Nouakchott un artificier qui fabrique les ceintures et un mufti qui peut faire le lavage de cerveau, et c'est encore plus inquiétant car cela veut dire qu'il y en aura d'autres". 

Selon le français Jean-Pierre Filiu, professeur associé à l'Institut d'études politiques (IEP) de Paris et auteur notamment des "Frontières du jihad", cette attaque marque "une fuite en avant, une radicalisation des techniques afin de viser une fois de plus l'impact médiatique. Ils sont en mal de publicité, et cela leur pose problème". 

"Pour l'AQMI et pour Al-Qaïda en général, le problème de la crédibilité terroriste est en train de devenir crucial". 

lundi 10 août 2009

Mauritanie: le kamikaze entraîné "dans des camps" du Sahara

Des policiers mauritaniens le 8 août 2009 près de l'ambassade de Mauritanie à Nouakchott, visée par un attentat.

NOUAKCHOTT — Le kamikaze qui s'est fait exploser samedi à Nouakchott, blessant très légèrement deux Français et une Mauritanienne, était un Mauritanien "recruté par les salafistes" et entraîné "dans des camps" situés dans le Sahara, a affirmé lundi sur RFI le ministre mauritanien de l'Intérieur.

Mohamed Ould R'Zeizim, interviewé sur Radio France internationale, commentait pour la première fois l'attentat suicide commis samedi à proximité de l'ambassade de France à Nouakchott.

Ce type de procédé est "tout à fait nouveau en Mauritanie" a souligné le ministre de l'Intérieur.

"La personne en question a été identifiée. Elle était répertoriée sur le fichier de la direction générale de la Sûreté" a-t-il dit.

"C'est un jeune natif de Nouakchott. On n'a jamais eu d'informations à son sujet qui pouvaient nous donner des indications sur son intégrisme. On a appris qu'il était en entraînement dans les camps, dans le grand désert situé entre la Mauritanie, le Mali et l'Algérie", a-t-il ajouté.

"C'est un jeune qui a été recruté par les salafistes. Je ne peux pas affirmer" qu'il a été recruté par Al-Qaïda au Maghreb islamique, a poursuivi M. Ould R'Zeizim, en réponse à une question à ce sujet.

Le ministre a assuré qu'il n'était "pas au courant d'arrestations" en rapport avec cet attentat mais a assuré que les enquêteurs étaient "sur une bonne piste". "On a arrêté pendant ce mois plusieurs personnes qui voulaient faire des actions pareilles", a-t-il dit.

Des policiers mauritaniens bloquent une rue près de l'ambassade de France à Nouakchott après un attentat, le 8 août 2009.

Samedi soir, un responsable policier avait déclaré à l'AFP que le kamikaze était "né en 1987 à Nouakchott" et qu'il avait été "formellement identifié comme un membre de la mouvance jihadiste".

Le quotidien Nouakchott info a assuré que deux jeunes Mauritaniens, détenus pour leur participation présumée à l'attaque menée en 2008 contre des soldats à Tourine (extrême nord), avaient été extraits de la prison de Nouakchott pour identifier le corps du kamikaze et l'avaient reconnu.

La télévision d'Etat a diffusé à plusieurs reprises les images du cadavre déchiqueté du kamikaze, un jeune homme noir dont les membres étaient éparpillés. Le kamikaze portait une petite barbe récente et une "gandoura" (tunique portée dans les pays du Maghreb).

La Mauritanie est cible depuis deux ans de diverses attaques de la branche maghrébine d'Al-Qaïda. Quatre touristes français y ont été assassinés fin 2007 et un ressortissant américain y a été tué par balles le 23 juin.

Depuis samedi, au moins deux réunions des services de sécurité ont eu lieu autour du chef de l'Etat investi la semaine dernière, l'ex-général putschiste Mohamed Ould Abdel Aziz, selon une source sécuritaire interrogée par l'AFP.

"Ces réunions, qui ont regroupé les chefs des instances sécuritaires de la République, ont évoqué les meilleurs moyens de prévenir et traiter toute velléité de nature à perturber la quiétude et la tranquillité des citoyens et des résidents étrangers" a indiqué la même source, s'exprimant anonymement.