jeudi 29 avril 2010

Fiction diplomatique

Un ambassadeur de France en exercice peut-il publier un roman sur un sujet aussi sensible que le terrorisme islamiste ? Oui, apparemment. Il faut dire que Jean-Christophe Rufin n'est pas du sérail : ce médecin, qui a exercé entre autres la psychiatrie à l'hôpital Saint-Antoine, à Paris, est devenu écrivain, a obtenu le prix Goncourt en 2001 pour Rouge Brésil (Gallimard), avant d'entrer à l'Académie française.

Son poste d'ambassadeur au Sénégal et en Gambie lui permet d'observer autrement l'Afrique qu'il avait connue naguère commeFrench Doctor.

Son héroïne, Jasmine, a réussi à se faire embaucher au service du protocole du Quai d'Orsay. De fil en aiguille, on va découvrir qu'elle est au coeur d'un diabolique complot. Mais qui est exactement cette jeune veuve de consul, à cheval entre deux mondes ? Jean-Christophe Rufin emploie toute la panoplie classique du thriller pour nous dévoiler peu à peu son rôle et sa personnalité.

Le suspense est entretenu par de courts chapitres, qui doivent laisser le lecteur en haleine. "Je crois que tu ferais mieux de tout raconter maintenant", s'exclame un personnage page 142. Point final. Page 143, c'est une autre scène, avec d'autres personnages, à plusieurs centaines de kilomètres de là... Le procédé est employé à plusieurs reprises.

Dans le Sahara, mine de rien, on se marche sur les pieds. Toutes sortes de gens se promènent dans cette immensité, sans véritables frontières, qui va de la Mauritanie au Tchad, en passant par l'Algérie, le Mali et le Niger : des Touareg, des trafiquants, des djihadistes, des espions... Plusieurs groupes concurrents, qui se réclament d'Al-Qaida, n'hésitent pas à commettre des attentats ou des enlèvements loin de leur camp de base (katiba).

Dans ce désert plein de dangers, un certain Kader Bel Kader est, si l'on peut dire, comme un poisson dans l'eau. Ce Robin des sables, bien équipé, vend de la protection à grande échelle. Il fournit des gardes du corps, des vivres, des cigarettes de contrebande, des appareils électroniques et naturellement des armes de tout acabit. "Il avait surtout une inépuisable provision d'histoires, longues ou courtes, anciennes ou récentes, vraies ou fausses. Grâce à elles, le désert devenait un village."

Jean-Christophe Rufin nous fait pénétrer dans le cerveau de ces fondamentalistes qui sont toujours entre deux prières, le kalachnikov à portée de la main. Les dialogues sonnent juste. A Paris, nous assistons, entre autres, à "l'essayage" d'une ceinture d'explosifs sur un futur martyr. On découvre aussi le fonctionnement d'une agence de renseignement privée qui a son siège en Belgique et travaille pour le compte de mystérieux commanditaires aux Etats-Unis... C'est clair, bien écrit, très instructif, d'une construction parfaite... et parfaitement impersonnel. On dirait que le romancier s'est ingénié à gommer tout ce qui aurait pu singulariser son style. Pourquoi pas ? Mais ce parti pris n'aide pas à faire naître une véritable émotion.

DIMITRI, L'AGENT AMOUREUX

Jasmine est sans doute très séduisante, déchirée entre ses deux éducations, mais un peu trop froide pour nous bouleverser. Le personnage le plus attachant est encore Dimitri, l'apprenti espion, un jeune médecin envoyé en Mauritanie pour surveiller des collègues islamistes, et qui fait l'erreur de tomber amoureux. C'est le genre de chose qui ne pardonne pas dans un monde de cyniques et d'illuminés...

Plutôt que de nous assurer, selon la formule consacrée, que toute ressemblance avec des personnes réelles serait purement fortuite, Jean-Christophe Rufin complète son livre par une postface intéressante. Il reconnaît quelques "dettes infidèles". Entendez par là des rencontres marquantes dont il s'est inspiré.

Une nuit de Noël, en 2007, il a accueilli à Dakar le survivant d'un attentat commis contre une famille française en Mauritanie. L'ambassadeur ne s'en est jamais vraiment remis. Des années auparavant, en tant que militant humanitaire, il avait croisé la jeune veuve d'un consul de France, abandonnée par l'administration, qui frappait à toutes les portes et allait finir par être engagée dans un service du protocole... Il regrette de n'avoir pu l'aider.

"Arracher les détails à leur contexte, écrit-il, les mêler à d'autres auxquels ils sont étrangers, s'en servir comme tremplin pour l'imaginaire, et ajouter à des événements authentiques des développements inventés, voilà quelques-unes des méthodes par lesquelles le romancier altère la réalité pour en faire le matériau de ses rêves." Ce n'est pas nouveau, c'est même assez banal, mais toujours passionnant à décortiquer.

Robert Solé

Une force régionale contre Al-Qaida au Maghreb

L'Algérie, le Niger, le Mali et la Mauritanie engagent 25 000 hommes dans la luttecontre les terroristes islamistes, qui utilisent le désert du Sahel comme sanctuaire.

Est-ce la fin d'Al-Qaida au Maghreb islamique ? Pas encore. Mais les États limitrophes du Sahel semblent ¯ enfin ¯ décidés à mettre le paquet pour éradiquer les quelques centaines de djihadistes qui, depuis un peu plus de trois ans, multiplient les embuscades dans cette immense bande désertique...

La ville de Tamanrasset, dans le sud algérien, héberge depuis le début du mois un quartier général, chargé de coordonner les militaires algériens, maliens, nigériens et mauritaniens engagés dans la traque. « Il y a dès à présent 25 000 soldats à sa disposition. Ce chiffre passera à 75 000 d'ici à 2012 »,annonçait, mardi, la télévision d'Alger.

Les Occidentaux encourageaient de longue date cette coopération, essentielle à leurs yeux pour lutter contre l'Aqmi. Cette émanation du GSPC algérien a prêté allégeance à Ben Laden, recruté dans toute la région et multiplié les attaques contre des Européens, depuis l'assassinat, en 2007, de quatre touristes français en Mauritanie. Ses commandos échappent à leurs poursuivants, en jouant à saute frontière et en achetant la protection de groupes rebelles touaregs.

Rapts et enlèvements

Rien qu'en 2009, une dizaine d'Occidentaux ont été enlevés, principalement le long de la frontière entre Niger et Mali. Si le Français Pierre Camatte a été relâché en février, contre la libération de quatre islamistes maliens, le Britannique Edwyn Dyer a eu moins de chance. Ses ravisseurs l'ont tué, en juin 2009, Londres ayant refusé de libérer le Palestinien Abou Qatada, l'un des principaux idéologues d'Al-Qaida. Plusieurs Européens sont toujours retenus dans le désert, dont un Français de 78 ans kidnappé la semaine passée au Niger.

Si l'Aqmi n'a jamais perpétré d'attentat hors d'Afrique, son chef, Abdelmalek Droukdel, et le n°2 d'Al-Qaida, Ayman el-Zawahiri, profèrent régulièrement des menaces, en particulier contre la France et l'Espagne. Des menaces prises au sérieux par les renseignements occidentaux : l'enlèvement contre rançon, le trafic de cigarettes et de drogue ont permis à l'Aqmi de se renforcer et de recruter des jeunes, entraînés, loin de tout, au maniement des armes et des explosifs.

Ouest France

mercredi 28 avril 2010

Un ancien ministre sommé de rembourser 1,6 M USD dépensés sans justification

L'ancien ministre mauritanien des Finances du gouvernement de transition de 2009, Sidi Ould Salem, a été sommé par la Cour des Comptes de reverser au Trésor public la somme de 417 millions d'ouguiyas (environ 1,6 million de dollars), dépensés sans justification, a-t-on appris de sources judiciaires.

La cour reproche à l'ancien ministre de s'être livré à des malversations pendant qu'il était directeur général de la société de construction et de gestion immobilière (SOCOGIM) de 2007 à 2009, a affirmé une source proche de ce dossier.

La cour avait initialement demandé à l'ancien ministre de s' expliquer à propos de sa gestion, mais les réponses qu'il a fournies "n'ont pas été convaincantes", affirme-t-on de même source.

Ould Salem appartient au Rassemblement des Forces démocratiques, principale formation de l'opposition en Mauritanie, au nom duquel il a participé aux négociations de Dakar en juin et juillet 2009. Ces négociations avaient abouti à la signature de l'accord cadre consacrant le dénouement de la crise institutionnelle née du coup d'Etat du 6 août 2008.

Xinhua

mardi 27 avril 2010

Une mission de réconciliation de l'UJA en Mauritanie

Tunis, Tunisie - L'Union des journalistes arabes (UJA) a décidé dimanche de dépêcher à Nouakchott, en Mauritanie, une mission d'enquête pour se rendre compte de la situation née de la présence dans le pays de deux organisations dans le but de les unifier.

Dans une déclaration finale publiée à l'issue de sa réunion, l'UJA indique avoir reçu une demande d'adhésion d'un nouveau syndicat mauritanien des journalistes.

Elle souligne toutefois s'être penchée sur le point de vue de la Ligue des journalistes mauritaniens qu'elle considère comme "l'entité professionnelle existante qui représente les journalistes mauritaniens et défend leurs droits".

L'UJA déclare qu'elle "déploiera tous les efforts pour l'unification des deux organisations ou pour parvenir à une formule qui empêche l'existence de deux entités en Mauritanie et qui préserve l'unité professionnelle des journalistes".

PANA

lundi 26 avril 2010

Paris se mobilise après l'enlèvement d'un Français au Niger

Le ministère français des Affaires étrangères a confirmé l'enlèvement d'un Français au Niger la semaine dernière, dans une zone dite "rouge" du pays où Paris déconseille formellement de se rendre.

L'enlèvement s'est produit dans le Nord, près des frontières algérienne et malienne. Un officier de l'armée nigérienne, qui a requis l'anonymat, a déclaré vendredi que, selon Niamey, les ravisseurs et leurs otages étaient passés au Mali.

"Nous sommes pleinement mobilisés, tant à Paris que sur le terrain, pour obtenir la libération de notre compatriote", a dit un porte parole du Quai d'Orsay lors d'un point de presse.

Il n'a donné aucune précision quant à l'identité, l'âge ou les raisons qu'avait le ressortissant français de se trouver dans cette partie du Niger. Selon une source proche des services de renseignement français, il s'agirait d'un touriste âgé de 78 ans, dont le chauffeur algérien a été enlevé en même temps, près de Tiguidan Tessoun.

Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères a renouvelé les conseils de prudence pour les déplacements dans cette partie du Sahara.

"En raison de l'aggravation du risque d'enlèvements et de la menace terroriste dans certaines régions du Sahel, il est plus que jamais recommandé aux Français résidents et de passage de respecter strictement les consignes de prudence et de vigilance notamment pour les déplacements dans certaines régions du Mali, du Niger et de la Mauritanie", a-t-il dit.

L'enlèvement "s'est produit dans une zone dite 'rouge'" ce qui signifie qu'elle est frappée d'une "recommandation formelle de ne pas s'y rendre", a rappelé le porte-parole.

Les enlèvements sont fréquents dans cette partie du Sahara où se croisent bandits, anciens rebelles et groupes affiliés aux djihadistes d'Al Qaïda.

Six Européens ont été kidnappés l'an dernier dans la région. Les otages ont fini par se retrouver aux mains d'Al Qaïda au Maghreb islamique, l'ex-Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) algérien.

Depuis, quatre otages, dont le Français Pierre Camatte, ont été libérés mais deux Espagnols restent prisonniers.

Le rapt du Français et de son chauffeur est intervenu au moment où le Mali, le Niger, l'Algérie et la Mauritanie, mettaient en place un centre de commandement conjoint pour coordonner la lutte contre la menace grandissante que représentent dans la région les islamistes d'Al Qaïda.

Laure Bretton

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La majorité accuse l'opposition d'attiser les tensions ethniques

La coalition au pouvoir en Mauritanie a accusé dimanche soir l'opposition de vouloir "raviver" la question ethnique dans le pays, après de récents affrontements entre étudiants au sujet de l'arabisation de l'administration.

La coalition au pouvoir en Mauritanie a accusé dimanche soir l'opposition de vouloir "raviver" la question ethnique dans le pays, après de récents affrontements entre étudiants au sujet de l'arabisation de l'administration.

Le président de la coalition des partis de la majorité (CPM), Mohamed Mahmoud Ould Mohamed, a évoqué devant la presse une "tentative désespérée de certains partis d'opposition qui interprètent faussement les déclarations faites par le gouvernement et qui ravivent les considérations des appartenances ethniques".

"L'opposition mène une campagne mensongère prétendant que la Mauritanie est en état de crise continue. L'objectif réel est de remettre en cause les grands chantiers en cours de réalisation et ceux en perspective", a affirmé le président de la CPM (11 partis) dont la principale formation est l'Union pour la République (UPR) du président Mohamed Ould Abdel Aziz.

Le 15 avril, à l'université de Nouakchott, des affrontements avaient opposé des étudiants pro-arabes (maures) et des étudiants négro-mauritaniens opposés à "l'arabisation complète de l'administration".

Cette confrontation intervenait après une série de manifestations et contre-manifestations autour de la question de la langue de l'administration.

Les francophones, principalement des négro-mauritaniens, contestent l'arabisation et y voient une exclusion de leurs cadres formés en français, tandis que les arabophones contestent la place occupée par le français dans le système éducatif et dans l'administration en tant que langue de travail.

La polémique avait éclaté après la célébration par la Mauritanie de la journée de la langue arabe, le 1er mars. Le Premier ministre, Moulaye Ould Mohemd Laghdaf, avait alors affirmé que la civilisation du pays était "arabo-islamique". Deux semaines plus tard, le ministre de l'Enseignement supérieur Ahmed Ould Bahya avait tenté de calmer les esprits, en assurant qu'"aucune option pour une arabisation complète" n'avait été prise par le gouvernement.

La Coalition de l'opposition démocratique (COD), qui rassemble la majeure partie de l'opposition, avait jugé fin mars que les prises de position du gouvernement étaient "démagogiques". Elle avait alors évoqué "des risques de réveil des dissensions ethniques et des conflits".

AFP

dimanche 25 avril 2010

La presse privée mauritanienne boude une émission télévisée à cause de la censure

La presse privée mauritanienne a décidé de boycotter une émission de la télévision nationale intitulée "Club de la presse", en raison de la censure, a-t-on appris samedi auprès des éditeurs.

Selon le Rassemblement des éditeurs de la presse mauritanienne, l’administration de la télévision nationale avait censuré dans une précédente émission des déclarations d’un journaliste de la presse privée.

Ce journaliste, Kissima Diagana, rédacteur en chef de l’ hebdomadaire "La Tribune", avait évoqué au cours de cette émission pré-enregistrée des questions relatives à l’unité nationale, aux déchets toxiques générés par l’activité de certaines compagnies étrangères et à l’électrification de quartiers périphériques.

Le journaliste estime que cette censure est essentiellement due au fait qu’il avait devant lui, sur le plateau, un journal portant une photo de l’ancien président Maouiya Ould Taya (1984-2005), au moment où il tenait des propos assez critiques concernant la question de l’enseignement de la langue arabe, objet de polémique.

Plusieurs dizaines de personnes ont été blessées et d’autres arrêtées, la semaine passée, suite à des heurts d’étudiants sur fond de polémique née d’une déclaration du Premier ministre mauritanien, appelant à la "généralisation de l’usage de la langue arabe dans les administrations

La presse privée continue à exiger, comme condition sine qua non de sa participation à cette émission, la diffusion par la télévision nationale de ce numéro, a indiqué M. Ahmed Ould Cheikh, président du Rassemblement des éditeurs de la presse mauritanienne et directeur du journal "Le calame".

Ould Cheikh a lancé un appel à l’endroit des journalistes de la presse privée afin qu’il observent ce boycott.

La télévision nationale de Mauritanie diffuse, depuis quelques temps, des émissions de libre expression et de dialogue direct avec de hauts responsables gouvernementaux, et couvre les activités des partis de l’opposition.

Xinhua

samedi 24 avril 2010

Le Mali en alerte après le rapt d'un Français au Niger

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Le Mali a placé vendredi ses forces de sécurité en état d'alerte après l'enlèvement d'un touriste français et de son chauffeur algérien mercredi soir dans le nord du Niger voisin, près des frontières algérienne et malienne.

Un officier de l'armée nigérienne, qui a requis l'anonymat, a déclaré que selon Niamey les ravisseurs et leurs otages étaient déjà passés au Mali. "Nous pensons qu'ils se trouvent quelque part dans la bande d'Azaouagh", a-t-il dit, faisant référence à une vallée reculée du nord du Mali.

Le touriste français est âgé de 78 ans, a-t-on appris de source proche des services de renseignement français.

Le rapt est intervenu le jour même de la mise en place à Tamanrasset, dans le sud de l'Algérie, par le Mali, le Niger, l'Algérie et la Mauritanie, d'un centre de commandement conjoint pour coordonner la lutte contre la menace grandissante que représentent dans la région les islamistes d'Al Qaïda.

"Dès qu'il y a un enlèvement, tout le monde regarde vers le Mali, qu'on considère comme la base arrière d'Al Qaïda", a-t-on déclaré vendredi au ministère malien de la Défense.

"C'est pourquoi (...) nous avons mis en alerte nos forces de sécurité à la frontière avec le Niger dans le cas où les ravisseurs tenteraient, comme d'habitude, de la franchir. Mais la zone à surveiller est très étendue et les ravisseurs connaissent très bien le terrain", a-t-on ajouté de même source.

L'enlèvement a lieu mercredi soir près de Tiguidan Tessoun, "à équidistance de la frontière avec l'Algérie vers l'est, et de la frontière avec le Mali vers le nord", a-t-on précisé de source militaire nigérienne.

Les enlèvements sont fréquents dans cette partie du Sahara où se croisent bandits, anciens rebelles et groupes affiliés aux djihadistes d'Al Qaïda.

Un responsable du ministère français des Affaires étrangères a indiqué vérifier l'information, sans plus de détails.

Six Européens ont été kidnappés l'an dernier dans la région. Les otages ont fini par se retrouver aux mains d'Al Qaïda au Maghreb islamique, l'ex-Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPS) algérien, qui a intensifié ses activités au Sahara ces derniers mois.

Depuis, quatre otages ont été libérés mais deux Espagnols restent prisonniers de leurs ravisseurs.

Les observateurs estiment que les groupes affiliés au réseau djihadiste ont rempli leurs coffres grâce à l'argent versé pour libérer les otages, même s'il n'y a jamais confirmation du versement d'une rançon.

Avec Abdoulaye Massalatchi à Niamey et Nicolas Bertin à Paris; Jean-Stéphane Brosse et Guy Kerivel pour le service français.

Reuters

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La Mauritanie va améliorer les conditions de détention dans les prisons

(PANA) Nouakchott, Mauritanie - Le ministère mauritanien de la Justice s'est engagé à améliorer les conditions de détention dans les prisons du pays, à prendre en compte les revendications des détenus et à accélérer les procédures en vue de procès équitables pour tous dans une déclaration parvenue vendredi à la PANA.

La déclaration du ministère a été rendue publique à la suite d'une visite du ministre de la Justice, Abidine Ould El Kheir, dans les prisons de Nouakchott.

Au cours de cette visite, le ministre a écouté les doléances de la population carcérale, notamment un groupe de détenus, des présumés terroristes, accusés d'appartenir à la branche Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI).

Au cours des derniers jours, ces détenus accusés d'actes terroristes ont observé une grève de la faim pour protester contre leurs conditions de détention et pour réclamer un procès rapide, juste et équitable garantissant la présomption d'innocence et les droits de la défense.

Lors d'une mission effectuée il y a quelques mois en Mauritanie, la Commission africaine des droits de l'Homme et des peuples (CADH) avait déploré le surpeuplement des prisons.

La principale Maison d'arrêt de Nouakchott, située dans la commune de Dar Naim, dans la banlieue, conçue pour recevoir 300 détenus, en héberge actuellement un millier.

Dix millions de personnes en état "d'insécurité alimentaire" au Sahel

Le Monde.fr avec AFP
Quelque 10 millions de personnes souffrent de la grave crise alimentaire qui touche plusieurs pays de la région du Sahel, a indiqué vendredi 23 avril le responsable des affaires humanitaires de l'ONU, John Holmes. Parmi ces personnes figurent 7,8 millions d'habitants du Niger qui sont en "état d'insécurité alimentaire".

"La nouvelle crise alimentaire est très préoccupante. Elle est plus grave au Niger",mais "il y a aussi le Tchad et la Mauritanie peut-être", a déclaré M. Holmes lors d'un point de presse à Dakar. "Le niveau de malnutrition a atteint un niveau alarmant dans plusieurs régions du Niger avec une malnutrition sévère surtout chez les enfants" en raison notamment de la sécheresse ayant affecté les récoltes, a-t-il déploré.

M. Holmes a appelé la communauté internationale à "agir maintenant pour éviter les pires conséquences", rappelant que l'ONU avait "lancé un appel d'urgence de 200 millions de dollars pour le Niger il y a deux semaines. Les fonds tardent un peu à arriver mais les bailleurs de fonds commencent à sentir la nécessité de répondre d'une manière sérieuse"."Pour l'instant, nous n'avons pas grand chose en main mais je suis relativement optimiste", a-t-il poursuivi, précisant que son voyage dans la région avait justement pour but d'"attirer l'attention de la communauté internationale sur la crise actuelle".

vendredi 23 avril 2010

M. Biram Ould Dah Ould Abeid interdit d’exercer ses activités de défense des droits de l’Homme

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, un programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), condamne les actes de harcèlement, d’intimidation et de rétorsion exercés à l’encontre de M. Biram Ould Dah Ould Abeid, président de l’Initiative de résurgence du mouvement abolitionniste en Mauritanie (IRA) et chargé de mission auprès de SOS-Esclaves.

Le 15 avril 2010, M. Mohamed Mahmoud Ould Mohamed Saleh, directeur des libertés publiques du ministère de l’Intérieur a convoqué M. Biram Ould Dah Ould Abeid dans son bureau à Nouakchott afin de l’enjoindre de “cesser toute déclaration ou activité de lutte contre l’esclavage”, en le menaçant d’être poursuivi pour “activités illégales” et placé en détention s’il ne respectait pas cette injonction. Au cours de cette entrevue, M. Biram Ould Dah Ould Abeid s’est également vu signifier le maintien de sa révocation comme conseiller à la Commission nationale mauritanienne des droits de l’Homme.

Cette convocation intervient dans un contexte de violente campagne de diffamation menée ces derniers mois par le site d’information en ligne Carrefour de la République islamique de Mauritanie (CRIDEM), accusant M. Biram Ould Dah Ould Abeid de “blasphème contre la religion musulmane”, de “racisme contre la communauté maure”, et de “complot contre la Mauritanie”. Le 19 février 2010, l’imam de la mosquée centrale de Nouakchott a par ailleurs accusé M. Biram Ould Dah Ould Abeid de représenter une « menace pour la religion islamique », et déclaré qu’il « méritait la pendaison » pour avoir dénoncé la persistance de l’esclavage en Mauritanie ainsi que sa légitimation par l’application de la charia.

L’Observatoire condamne les actes de harcèlement, d’intimidation et de rétorsion à l’encontre de M. Biram Ould Dah Ould Abeid ainsi que son renvoi de la Commission nationale des droits de l’Homme, qui ne semblent viser qu’à sanctionner ses activités en faveur des droits de l’Homme en Mauritanie.

L’Observatoire demande aux autorités mauritaniennes de mettre un terme immédiat aux actes de harcèlement à l’encontre de M. Biram Ould Dah Ould Abeid et de prendre toutes les mesures nécessaires afin de garantir son intégrité physique et psychologique, conformément aux articles 1 et 12.2 de la Déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l’Homme.

FIDH

mercredi 21 avril 2010

Identité et vieux démons

Marianne Meunier | Jeune Afrique
Lors de la manifestation d'étudiants noirs devant l'université de Nouakchott, le 24 mars.Lors de la manifestation d'étudiants noirs devant l'université de Nouakchott, le 24 mars.© D.R








Maladroites, les déclarations du Premier ministre sur l’arabité du pays suscitent une levée de boucliers au sein de la population d’origine subsaharienne.

La Mauritanie est-elle arabo-berbère ? Noire ? Les deux ? Cinquante ans après son indépendance, le « trait d’union entre le Maghreb et l’Afrique subsaharienne » – référence à la situation du pays et à la diversité de sa population – n’en a pas encore fini avec les questions identitaires.

Le 25 mars, Nouakchott fêtait la « réconciliation nationale », instaurée en 2009 par le président Mohamed Ould Abdelaziz pour rendre hommage aux victimes des « années de braise », ces dizaines de milliers de Noirs qui, au tournant des années 1980, fuyant le racisme arabo-berbère, durent se réfugier au Sénégal et au Mali, alors que des centaines d’autres, surtout dans l’armée et l’administration, subissaient des exactions parfois meurtrières.

Haro sur le français

Jusqu’au mea culpa d’« Aziz », il y a un an, ces années de plomb étaient soigneusement occultées dans l’histoire officielle. Une censure qui a renforcé chez les Noirs l’impression d’être discriminés. Mais le pardon présidentiel n’aura que brièvement dissipé la méfiance. Dès sa seconde édition, une controverse aux relents racistes autour de la langue arabe a parasité la « réconciliation nationale ». Elle tient à deux phrases malheureuses lancées par le Premier ministre, Moulaye Ould Ahmed Laghdaf, le 1er mars, lors de la Journée internationale de la langue arabe : « Nous allons faire de la promotion de la langue arabe et de sa défense un principe, de son appui et de sa généralisation comme langue de travail […] un objectif. » Selon lui, un sursaut s’impose pour sauvegarder l’arabe, la langue « officielle » (selon la Constitution), menacée par celle de l’ex-colonisateur, le français, utilisé dans l’administration et des entreprises.

Une partie des Noirs, dont l’arabe n’est pas la langue maternelle, a accueilli ce discours avec suspicion. « Il ne faudrait pas que l’arabe devienne un instrument d’oppression », a averti Kaaw Touré, porte-parole des Forces de libération africaines de Mauritanie (Flam), dont le cheval de bataille est le partage du pouvoir entre Arabo-Berbères et Noirs. Trois jours plus tard, en conférence de presse, un journaliste noir demande au Premier ministre de traduire en français des propos qu’il venait de tenir en arabe. Réponse d’Ould Ahmed Laghdaf : « Nous sommes en Mauritanie, c’est un pays arabe. » Nouvel émoi de la communauté noire : « La Mauritanie est un pays arabe, mais pas seulement, elle a une double appartenance », selon Kane Hamidou Baba, candidat à la présidentielle de 2009. La polémique enfle et donne lieu, le 24 mars, à des manifestations d’étudiants noirs devant l’université de Nouakchott. Le lendemain, la réconciliation nationale est célébrée dans un climat tendu.

« Choc des frustrés »

Les craintes d’une nouvelle explosion de racisme sont-elles justifiées ? Le 14 mars, huit partis politiques ont organisé un point de presse sur le thème « la primauté de l’arabe doit être absolue et perpétuelle ». Mais aucune « grande » formation n’y a pris part. De leur côté, les autorités se veulent rassurantes : « Nous sommes un pays divers et fier de sa diversité, se défend le Premier ministre. L’arabe a été le véhicule de notre culture islamique. […] Il y a lieu de le préserver. […] Mais ce n’est nullement exclusif. Chaque Mauritanien doit se revendiquer de l’arabe, mais aussi du pular, du soninké et du wolof. »

Pour Mohamed Ould Maouloud, président de l’Union des forces de progrès (UFP), les réactions aux propos du Premier ministre sont le résultat d’un « choc des frustrés ». D’un côté, les Noirs, qui n’ont « pas de garantie pour l’avenir »,leurs langues – soninké, pular notamment – étant qualifiées par la Constitution de « langues nationales », expression floue ne donnant lieu à aucune application pratique. De l’autre, les nationalistes arabes, qui craignent pour le devenir de leur identité. En 1999, le bilinguisme avait été imposé à l’école, le français étant réservé aux matières scientifiques et l’arabe cantonné aux matières littéraires. « Les autorités doivent se tenir à équidistance des Arabo-Berbères et des Noirs », poursuit Ould Maouloud, préférant voir dans les déclarations du Premier ministre des « maladresses ». Chacun ne demande qu’à le croire.

Un QG contre Aqmi


Un soldat malien patrouille après une attaque d'Aqmi.Un soldat malien patrouille après une attaque d'Aqmi.© Archives/AFP

Quatre Etats de la région du Sahara s’unissent pour lutter contre l’expansion d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Un quartier général commun, militaire et stratégique, a été mis en place dans le sud de l’Algérie, le 21 avril.

Les pays de la bande sahélo-saharienne s’activent pour combattre Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). L’Algérie, la Mauritanie, le Niger et le Mali se sont associés contre la menace terroriste et inaugurent mercredi 21 avril un quartier général situé dans le sud de l’Algérie, à Tamanrasset. Objectif : regrouper leurs moyens pour améliorer l'efficacité de la surveillance du territoire, et des zones frontalières en particulier.

Cette décision découle de la coopération nouvellement instaurée entre les pays de la région. En mars dernier, lors d’un sommet diplomatique à Alger, les hauts-responsables avaient décidé d’agir de manière collective en renforçant leur coopération sécuritaire et militaire. Le QG coordonnera des actions dont on ne connaît pas encore la teneur. Il pourra s’agir d’opérations armées, d’enquêtes, d’investigations de renseignement…

L’Algérie leader de la lutter anti-terroriste

L’Algérie a été placée au cœur du dispositif, en tant que puissance régionale. La communauté internationale est d’ailleurs favorable à ce rôle de pivot, et avait déjà félicité les différents pays associés pour la mise en commun de leurs ressources.

Cette base de commandement transnationale tentera de freiner l’expansion des groupes islamistes de la région, où les attaques et enlèvements se sont multipliés ces derniers mois. La branche maghrébine d’Al-Qaïda essaie de faire du désert une vaste base arrière pour ses combattants. Si le couple d’Italiens détenu depuis quatre mois par Aqmi, a été libéré la semaine dernière, deux Espagnols encore retenus dans le désert malien : Albert Vilalta et Roque Pascual, deux humanitaires enlevés le 29 novembre 2009 en Mauritanie. Depuis le début de l’année, les libérations se font plus régulières, et l’intervention des Etats n’y est pas étrangère.

Mais les divergences d’opinion entre les différents partenaires engagés dans la lutte contre Aqmi, au sujet du versement de rançons ou de la libération d'islamistes emprisonnés contre la libération d’otages risque cependant de constituer une limite à ce dispositif de coopération transfrontalier.



mardi 20 avril 2010

Jean-Christophe Rufin : "Ma liberté n'est pas négociable !"

Propos recueillis à Dakar par Cécile Sow
L'auteur de Katiba, ambassadeur de France à Dakar, au Cap Manuel, non loin de sa résidence.L'auteur de Katiba, ambassadeur de France à Dakar, au Cap Manuel, non loin de sa résidence.© LYDIE/SIPA

Inspiré de l’assassinat, en 2007, de touristes français en Mauritanie, le nouveau roman de Jean-Christophe Rufin sort en librairie le 21 avril. Rencontre avec un écrivain diplomate.

La poignée de main est franche, de même que le sourire. En apparence, tout va bien. Pourtant, Jean-Christophe Rufin n’est pas au meilleur de sa forme. L’écrivain, élu à l’Académie française en juin 2008, et ambassadeur de France au Sénégal depuis 2007, reconnaît avoir besoin de vacances. Son nouveau roman, Katiba, sort en librairie le 21 avril. Son appréhension est perceptible. Quand un diplomate parle de terrorisme islamiste, c’est délicat. Quand le point de départ de son histoire est un fait réel, ça l’est encore plus.

Dans Katiba, les quatre touristes français assassinés en Mauritanie en décembre 2007 sont devenus des voyageurs italiens. Comme les Français, ils sont abattus froidement. À des milliers de kilomètres, Jasmine, fonctionnaire au Quai d’Orsay, entretient des liens étranges avec le monde musulman. Elle est un élément essentiel d’un puzzle dont les pièces sont éparpillées entre Paris et Alger, les États-Unis et les émirats du Golfe. Elle est aussi le trait d’union entre deux mondes que l’auteur fait découvrir de l’intérieur.

Jean-Christophe Rufin devrait quitter le Sénégal en juin. En attendant une éventuelle nouvelle affectation, il s’inquiète moins de l’accueil qui sera réservé à son livre dans les milieux littéraires que de sa liberté d’écrire. Quand on lui parle d’avenir, il répond d’ailleurs que ça dépendra beaucoup des réactions suscitées par son roman. Interview.

Jeune Afrique : Dans Katiba, vous entraînez vos lecteurs au cœur de l’actualité…

Jean-Christophe Rufin : Les premières scènes sont des attaques contre des touristes en Mauritanie. Ce sont des faits réels. Mais j’ai voulu plus largement explorer l’univers de l’extrémisme islamique au Sahara. C’est un fait nouveau, encore peu connu. Et de plus en plus inquiétant. J’ai souhaité également réfléchir sur la double culture à travers le personnage de Jasmine. Elle comprend les choses de l’intérieur et peut être le trait d’union entre la culture européenne, française en l’occurrence, et le monde musulman, maghrébin. Ce n’est pas un livre pour le fondamentalisme musulman, mais ce n’est pas non plus un livre de dénonciation bête et méchant qui fait de l’islamisme une sorte d’ovni politique incompris.

Le fait d’avoir suivi des agents de la DGSE dans la traque des assassins de ces quatre touristes a-t-il apporté un plus ?

Ce n’est pas le sujet du livre. On démarre sur cette attaque, c’est tout.

Vous dites dans la postface que vous utilisez « beaucoup d’objets collectés par l’expérience ».

Oui, mais je ne trahis aucun secret d’État. J’utilise ce que j’ai vu et je le transpose pour en faire une fiction. Cela donne une intrigue romanesque qui, elle, n’est pas tirée de mon expérience. Elle vient de l’imaginaire.

Katiba, de Jean-Christophe Rufin,
Flammarion, 400 pages, 20 euros.
En librairie le 21 avril.

Votre fonction d’ambassadeur n’entrave en rien votre liberté d’écrivain ?

Quand le président de la République et le ministre des Affaires étrangères m’ont nommé à ce poste, ils m’ont dit : « Surtout, continue à écrire. » Maintenant, on verra si c’est accepté et compris. Mais je ne peux exercer ces fonctions qu’en étant un homme libre. Ma liberté n’est pas négociable.

L’intégrisme religieux vous fait-il peur ?

La question n’est pas d’en avoir peur ou pas, mais de comprendre d’où il vient. Les extrémistes ne sont pas des extraterrestres. Ce sont des gens qui ont une certaine logique. Jasmine est sur la crête entre deux mondes qui ne sont pas si éloignés l’un de l’autre. Et c’est pour cela que le fondamentalisme est dangereux. Même en France, il y a des gens qui ont cette double culture et peuvent basculer d’un côté ou de l’autre. C’est pourquoi j’ai mis en exergue ce proverbe sénégalais : « Un chien a beau avoir quatre pattes, il ne peut pas suivre deux chemins à la fois. »

Il faut donc comprendre pour éradiquer ?

On ne peut pas faire l’économie, dans l’approche de ces phénomènes, d’une compréhension de ce qui à la fois provoque ce type d’engagement et de toutes les forces qui agissent autour. Il y a une géopolitique de ces phénomènes, qui se produisent souvent autour des frontières. Il y a aussi un jeu entre États, dans le Sahara et ailleurs. C’est tout cet ensemble qu’il faut comprendre.

Dans un de vos livres, vous écrivez : « Le mal est la seule passion à laquelle les hommes ne mettent point de limites »…

Quand on choisit de défendre ses idées par la violence, quand on pense que le fait d’avoir raison autorise tout, y compris éliminer les autres, il n’y a plus de limites. À l’intérieur de toutes les idéologies et de toutes les religions, il y a cette possibilité d’une dérive extrême. Ce n’est pas le propre de l’islam. Au sein de l’écologie, par exemple, qui a l’air extrêmement sympathique, il y a une forme de fondamentalisme et de radicalisme. En Angleterre, le Front de libération des animaux est l’un des mouvements les plus violents.

Vous êtes médecin, humanitaire, diplomate et écrivain, dans quel rôle vous plaisez-vous le plus ?

Ma vie de médecin est la trame de toute ma vie. J’ai été très loin dans l’interprétation de ce qu’est la médecine. Ce n’est pas juste soigner des gens. C’est aussi les comprendre. Comprendre ce qui les travaille, les fait vivre, les fait mourir. On peut le faire dans un hôpital, mais aussi dans une ambassade quand on écrit. C’est ce regard qui dépouille l’autre et essaie de le mettre à nu. Ce qui m’a formaté, c’est la médecine. Le reste – l’écriture ou des expériences de vie transitoires comme la diplomatie – n’est pas ce qui constitue mon identité profonde.

Votre dernier roman fait 400 pages, quand trouvez-vous le temps d’écrire ?

Je ne regarde pas la télévision, je n’aime pas tellement dîner dehors. La fonction diplomatique est une fonction totale : on n’a pas de dimanche, ni de vacances. Ce qui veut dire qu’au fond on a aussi beaucoup de temps. Plus vous travaillez, plus vous pouvez travailler. J’ai écrit ce livre l’année dernière à Dakar, pendant l’hivernage, au moment où tout marche un peu au ralenti. Je m’étais bien documenté les mois précédents. Et puis, ce roman m’a permis de tenir le coup, de m’évader. Je ne peux pas me satisfaire de ce que je fais toute la journée. J’ai besoin de l’imaginaire de la création, de garder cette part de rêve.

Être ambassadeur de France au Sénégal a donc été si pénible ?

C’est un poste difficile parce qu’on représente un pays important en Afrique de l’Ouest. La France pèse par ses liens historiques et économiques. Il y a une vie politique intense, et l’ambassadeur est un peu chargé de tous les maux. Dès que quelque chose va mal, on s’en prend à vous. On est responsable au sens plein du terme.

Il y a d’ailleurs eu des moments où la presse sénégalaise n’a pas été tendre avec vous. Ça vous a marqué ?

Oui. Avant j’avais une expression très libre, puis je me suis rendu compte que des gens ici ou ailleurs n’étaient pas de bonne foi et déformaient mes propos. On m’a reproché d’être bavard, ce qui était un peu exagéré. Je suis devenu plus réservé. Mais au fond, les gens m’ont adopté et compris. J’ai beaucoup d’amis au Sénégal.

JEAN-MICHEL TURPIN/FEDEPHOTO

Cette fonction diplomatique, pour un homme libre, ne revêt-elle pas un caractère contraignant ?

Oui, tout à fait. Mais j’ai exercé ce métier de la façon qui me paraissait la plus honnête, c'est-à-dire en ne faisant rien que ma conscience réprouve. Si dans dix ans ou quinze ans on ouvre les messages diplomatiques que j’ai envoyés, je les assumerai tous. Mais ce n’est pas facile de ne pas pouvoir dire tout ce que l’on veut.

Votre vie au Sénégal a-t-elle influé sur votre manière d’écrire ou d’aborder certaines problématiques ?

Mon séjour m’a donné un aperçu d’une Afrique que je connaissais mal. Ses peuples et son histoire sont complexes. Je me suis beaucoup intéressé aux confréries religieuses. Cela m’a ouvert des perspectives.

Sur quoi travaillez-vous maintenant ?

Je suis comme une cuisinière devant ses petits plats. Ça mijote, voilà. Je ne sais pas si ça donnera un thiep bou dien ou un poulet yassa.

Cela dépendra des ingrédients, qu’avez-vous sous les couvercles ?

J’ai plusieurs choses qui chauffent. Quand j’écris un livre c’est parce que j’en ai vraiment envie.

Vous avez écrit des romans historiques, un roman d’anticipation, des essais. La plupart ont une dimension géopolitique. Êtes-vous un homme politique frustré ?

[Rires] Je suis peut-être frustré, mais je ne suis pas un homme politique. Frustré parce que je ne suis jamais content de ce que je fais. Je recherche toujours la perfection.

Avez-vous des ambitions politiques ?

J’aurais pu, mais non. Je ne suis pas un homme du combat politique. Je suis incapable d’étrangler quelqu’un parce qu’il n’a pas les mêmes idées que moi. Ça ne m’intéresse pas de relayer des slogans. Je ne suis ni militant ni partisan.

Votre départ du Sénégal, après trois ans, est annoncé pour juin. Quelle sera votre prochaine destination ?

Je l’ignore.

Resterez-vous dans la diplomatie ?

Cela dépendra beaucoup de la manière dont sera accueilli le livre. Pas en termes littéraires. Si on accepte qu’un diplomate conserve sa liberté d’écrire et de penser alors rien ne m’interdira de prendre un autre poste. Si ce n’est pas le cas, je prendrai des vacances !

En début d’année, vous avez refusé de prendre la tête d’une agence supposée coordonner l’action des instituts culturels français à l’étranger. Pourquoi ?

La réforme est en cours. Elle vise à rationaliser l’action culturelle à l’extérieur en créant une agence. J’adhérais à ce projet, mais je n’ai pas l’énergie pour le porter. Ce n’est pas parce qu’on est un homme de culture qu’on est capable d’administrer la culture.

Des détenus accusés de "terrorisme" en grève de la faim

Des détenus à la prison de Nouakchott, accusés d'"actes terroristes" ou "d'appartenance à des groupes islamistes radicaux", ont entamé lundi une grève de la faim pour dénoncer leurs conditions de détention "difficiles", a-t-on appris mardi auprès de leurs proches.

"Ils refusent de s'alimenter depuis hier (lundi), nous sommes très inquiets pour eux et appelons tout le monde à convaincre les responsables d'améliorer leurs conditions carcérales difficiles", a affirmé l'épouse de l'un des détenus, postée devant la prison avec d'autres proches en quête d'informations.

Estimant être "maltraités", les prisonniers réclament une amélioration de leurs conditions de détention, une prise en charge "complète" de leurs malades "en situation déplorable" et l'accélération des procédures pour leur jugement, a affirmé cette femme, sous couvert de l'anonymat.

Elle n'a pas précisé combien de détenus menaient cette grève de la faim.

Parmi les prisonniers accusés de terrorisme, figurent les présumés meurtriers de quatre touristes français en décembre 2007 à Aleg (sud) et ceux d'un Américain tué de trois balles dans la tête en juin 2009 à Nouakchott.

Nombre de ces détenus sont en instance de jugement, mais d'autres purgent leur peine après avoir été jugés, selon des sources judiciaires.

"Tout prisonnier dont l'instruction sera achevée, sera immédiatement programmé pour être jugé", s'il n'est pas relaxé, a promis mardi le parquet dans un communiqué, affirmant que certains seraient jugés à partir de mai.

Le gouvernement avait organisé début 2010 un "dialogue spirituel" entre ces détenus et des théologiens qui devait les amener à renoncer à leurs "convictions jihadistes" et à retrouver les "vertus de tolérance de l'Islam malékite" pratiqué en Mauritanie.

Des érudits avaient ensuite affirmé que plus de 80% des extrémistes détenus avaient "regretté" leurs actes, au cours de ce dialogue, et s'étaient engagés dans la voie de "l'islam pacifique et tolérant de leurs ancêtres et de leur peuple". Ils avaient alors promis la "libération des innocents parmi eux et des jugements indulgents pour les autres".

AFP