mercredi 15 juillet 2009

Rappel: Une marchandise impérissable, novembre 2007

Dans le passé, aucune marchandise n’a fait la réputation des Mauritaniens autant que la culture et la connaissance, s’il est permis, sous l’angle de la description, de définir la culture et la connaissance comme étant une marchandise. Et quand cette  marchandise se dépréciait en Orient, elle enregistrait chez nous une hausse de ses cours et incarnait davantage notre personnalité.

Notre marchandise, par les temps actuels, pourrait être cette démocratie qui nous est arrivée subitement et dont le maniement est troublant pour nos relations au point que nous risquons de ne pas savoir comment en disposer. Certains d’entre nous voient dans la démocratie un mode de vie, un moyen de rationaliser le travail de masse dont l’apport principal est son aptitude à développer et à assurer la participation de tous. D’autres craignent la démocratie et n’en voient que les aspects gênants.

La mauvaise compréhension de la démocratie s’aggrave quand les populations sont à même d’exprimer l’irritation, le malaise, le mécontentement. Ceux que cela inquiète ne devraient pas oublier qu’il n’existe aucune démocratie dans le monde dont les villes ne s’enflamment quotidiennement de manifestations, de grèves,  de protestations, de sit in et de toutes les formes de malaise et d’affirmation de soi.

Si la démocratie ne se manifeste pas de la sorte, elle se transforme en une simple dictature déguisée. Ce sont les régimes dictatoriaux qui ne voient dans les formes d’expressions démocratiques que des complots, des combines et de la pêche en eaux troubles.

Quant aux régimes démocratiques, ils savent que la diversité et la richesse des formes d’expressions libres ne sont pas la preuve de leur impopularité, de leur impertinence ou de l’échec de leur programme. Bien au contraire, ils en sont fiers, et à juste titre, car la multiplicité des formes d’expression est une preuve de la richesse et de la diversité de la scène, une preuve de la vitalité de la gestion de l’espace démocratique même.

De tels gouvernements ne voient pas d’inconvénient à cela, leur esprit est ouvert à toute forme d’expression et n’y voient pas de danger sauf quand elles revêtent une dimension tribale, régionale ou raciale ou bien se caractérisent par la violence ou visent à saboter les intérêts ou à semer le désordre.

Les formes saines d’affirmation de soi offertes en vertu de la loi ne sont traitées par les gouvernements démocratiques que de façon civilisée, c'est-à-dire avec la négociation, le dialogue et la solution des problèmes qui sont à leur origine, loin des accusations, des préjugés et du recours à d’autres méthodes que nous avons connues, nous Mauritaniens, pendant des décennies et expérimenté leur échec à imposer la vérité, autant que leur incapacité à crédibiliser l’arbitraire.

Il ne fait aucun doute que la pratique de la démocratie ne peut venir que de démocrates qui n’ont le monopole ni du patriotisme ni de la vérité immuable et qui ne méprisent pas autrui sur la seule base d’illusions personnelles.

Il ne fait également aucun doute que le rôle de l’information – si elle n’est pas censurée- et si les communicateurs eux-mêmes acceptent de l’assumer, en particulier en matière de promotion de mentalités démocratiques,  constitue un grand rôle dont on ne peut se passer parce qu’il est, en dernier ressort, le miroir qui reflète la forme, la diversité et la vitalité de la démocratie.

Partant de cette compréhension, nous avons, à l’ICC, constamment insisté – et nous le faisons de nouveau – sur notre attachement à la liberté d’expression  et notre détermination à la promouvoir dans le cadre de nos efforts visant à participer à l’œuvre de refondation et d’édification de l’Etat de droit et des institutions démocratiques pour lequel nous souhaitons qu’il soit une marchandise impérissable, dans la Mauritanie nouvelle, la Mauritanie des réformes.