mercredi 6 octobre 2010

Refonte des transports publics en Mauritanie


Cinq ans après que l'Etat ait mis un terme à son monopole sur les transports, l'Etat mauritanien reprend du service.
Hamdi Ould Cheikh | Nouakchott
[Hamdi Ould Cheikh] Les bus publics en Mauritanie devraient être en concurrence avec les sociétés de transport privées aux termes d'un nouvel accord.
Le gouvernement mauritanien va revenir dans le secteur des transports en lançant un service de bus à Nouakchott. Pour les habitants résignés à des transports publics irréguliers, cette initiative était attendue depuis longtemps.
"Le retrait de l'Etat pendant de nombreuses années a encouragé la désorganisation dans ce secteur", a expliqué Ishaq Ould Mohamed Ahmed, un agent de la gare routière de Ksar.
"A Nouakchott, la plus grande ville du pays, seules deux stations de bus sont reconnues par l'Etat. Conséquence, la ville a mis en place un certain nombre de stations informelles et les véhicules partent d'un peu n'importe où. Le retour de l'Etat permettra de faciliter la mise en place de stations de bus nouvelles et bien équipées", a-t-il expliqué.
En 2005, le secteur des transports a été réformé et le Bureau national des transports (BNT), qui bénéficiait d'un monopole depuis plus de 20 ans, a été démantelé.
Après le retrait de l'Etat, les sociétés privées ont pris le relais. La concurrence qui en a résulté a entraîné une chute des tarifs, mais la mise en oeuvre des réformes s'est avérée chaotique.
"Sur les 38 licences accordées à des sociétés privées et les 95 licences pour les transports en bus, beaucoup ne satisfont pas à la réglementation ou ont arrêté leurs opérations", a souligné Hassen Ould Brahim, directeur de l'agence de voyage Aftoutours.
Le désordre dans ce secteur a incité le gouvernement à réexaminer la situation. En janvier, le Président Mohamed Ould Abdel Aziz a annoncé un plan destiné à mettre en place un réseau de transport urbain. Pour tenter de résoudre le problème de la concurrence, le gouvernement a mis en place une Autorité de régulation des transports.
Considéré comme une question urgente, ce système devrait être lancé dans les trois mois qui viennent et impliquera la mise en circulation de 500 taxis et 500 bus.
"La nouvelle entreprise nationale, qui dispose de moyens financiers et humains importants, est pour nous un sérieux concurrent ; mais la création par l'Etat d'une autorité de régulation est une mesure significative", a expliqué Abdellahi Ould Seddigh, directeur d'une compagnie de transport privée.
"Actuellement, les compagnies mauritaniennes privées font face à une concurrence injuste de la part de leurs homologues maliennes, sénégalaises ou marocaines. J'aimerais savoir pourquoi ces dernières ont accès librement au pays, alors que nos sociétés à nous n'ont pas encore le droit de traverser la frontière de ces pays voisins", a-t-il ajouté.
"Les augmentations régulières des prix des carburants amenuisent nos profits. La nouvelle société de transport publique bénéficiera certainement d'une exemption pour plusieurs produits, comme toutes les entreprises publiques. C'est de la concurrence déloyale", a affirmé Ahmedou Ould Mohamed Saleh.D'autres sociétés de transport privées ont fait part de préoccupations similaires à propos de leur nouveau concurrent étatique.
Si les sociétés de transport peuvent être gênées par cette nouvelle concurrence, les usagers de Nouakchott en revanche attendent ces changement avec impatience.
"Actuellement, pour se rendre à l'université, les étudiants doivent attendre de vieux minibus à arrêt demandé faiblement équipés et en trop petit nombre. Leur seule alternative est de prendre un taxi, ce qui revient cher", a expliqué Aminetou Mint Sidi Mohamed, étudiant à l'université de Nouakchott, à Magharebia.