dimanche 31 janvier 2010

Angoisse et espoir pour l’otage français


Pierre Camatte otage MaliParu dans leJDD

Pierre Camatte (à droite) connaissait bien la région dans laquelle il a été enlevé en novembre dernier. (Maxppp)

La nébuleuse terroriste Al-Qaïda avait donné jusqu’au 30 janvier. Passé cette date, le Français Pierre Camatte, enlevé au Mali le 26 novembre dernier, devait être exécuté. Samedi soir, à 22 heures, l’ultimatum a été officiellement repoussé à une date indéterminée. "Nous faisons tout, nous avons de l’espoir", indiquait un peu plus tôt à l’AFP un négociateur malien sous couvert de l’anonymat. Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), qui détient en tout six Européens en otages dans la région, avait menacé depuis le 10 janvier d’exécuter Pierre Camatte si quatre de ses combattants détenus au Mali n’étaient pas libérés d’ici à vingt jours.

Le Français Pierre Camatte, 61 ans, connaissait bien la région. Il y venait depuis une quinzaine d’années et semblait vouloir s’y installer définitivement. Président de l’association vosgienne Gérardmer-Tidamene, il apportait depuis toutes ces années des fournitures scolaires, avait construit un puits et soutenu la création d’une cantine et d’un dispensaire. Son dernier projet était de développer l’étude d’une plante qui pourrait soigner le paludisme. Il a été enlevé en pleine nuit, dans sa chambre d’hôtel, à Menaka, dans la région de Gao, à 1500 km de la capitale, Bamako.

Une zone infestée de criminels

Ce rapt a été suivi des enlèvements en Mauritanie voisine par les membres d’AQMI de trois humanitaires espagnols le 29 novembre, et de deux Italiens, dont une femme originaire du Burkina Faso, le 18 décembre. A l’inverse des trois Espagnols enlevés, il n’y aurait eu aucune preuve de vie du Français, selon un membre de l’association Gérardmer-Tidamene. Le président Amadou Toumani l’a martelé en prononçant ses voeux il y a quelques jours, "la politique de sécurité dans la zone saharo-sahélienne sera renforcée". Difficile à envisager, dans la mesure où cette zone sahélienne, aux confins du Mali, de la Mauritanie, de l’Algérie et du Niger, est depuis toujours infestée par les criminels en tout genre.

Cette région à hauts risques pour les Occidentaux sert aussi, depuis quelques années, de terre de repli aux sympathisants de la branche d’Al-Qaïda au Maghreb. C’est depuis cette région que les terroristes planifient les kidnappings d’Occidentaux, tandis que les criminels organisent le trafic de drogue, à destination en priorité du Soudan, de l’Egypte et de la Mauritanie. Le tout sous l’oeil impuissant des dirigeants des pays concernés. D’autant que les membres d’Al- Qaïda ont également réussi à infiltrer les zones tribales inaccessibles, et n’ont pas hésité à passer des alliances circonstancielles avec certains chefs de tribu, compliquant encore davantage la tâche des autorités locales.

Karen Lajon - Le Journal du Dimanche